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jeudi, 14 mai 2020 17:39

Bougez - Restez confinés by Adeline

Bonjour tout le monde,

Je m’appelle Adeline, j’ai 28 ans et pour ceux qui ne me connaissent pas je suis la fille de Thierry, Président de Bougez contre la SLA et d’Isa, la 1ère dame qui s’occupe de la permanence de l’association le vendredi.

Je suis et soutiens mes parents dans tous leurs défis associatifs et personnels y compris dans leurs courses folles afin de faire connaître la SLA depuis 2007 ! Et oui ça commence à faire même si depuis quelques années maintenant je suis moins présente physiquement du fait de mon métier, mais toujours attentive aux projets de l’association.

En effet, cela fait maintenant 6 ans que j’exerce le métier d’infirmière qui est un métier qui me colle à la peau, je ne me vois pas faire autre chose. C’est pourquoi pendant mes études et dès que je pouvais, j’accompagnais mes parents, je prenais un grand plaisir à m’occuper des personnes atteintes notamment de SLA. En vous écrivant ces quelques mots, je suis émue car je repense bien sûr à Alain, sans qui tout ça n’existerait pas. Mais également à Monique, Isabelle, Florian et bien sûr Cyril qui nous a quitté beaucoup trop tôt mais avec qui j’ai pu partager son dernier Marathon des Sables, en tant que bénévole.

Comme je vous le disais un peu plus haut, je suis infirmière depuis 6 ans. Je travaille dans un service de chirurgie, aux hôpitaux Universitaire de Strasbourg, mais depuis quelques temps maintenant j’ai dû changer mes habitudes. Il est vrai que depuis quelques semaines, nous vivons quelque chose d’un peu particulier et de dramatique. Cette crise sanitaire a totalement remis en cause nos organisations de travail dans les services, ainsi que nos habitudes de travail et nos façons de faire au sein de l’hôpital. En ce qui me concerne, je suis depuis le 18 Mars 2020 en renfort dans une unité Covid-19 de 23 lits. Je n’ai pas connu les premiers jours de la première vague dans ma région qui a été la première submergée par le nombre de malades. Je n’ai donc pas vécu tous les chamboulements de la mise en place que cette maladie a amenés avec elle. Mais ce n’est pas pour autant que je n’ai pas très vite compris l’extrême gravité de la situation pour les malades avant tout, mais aussi pour notre système de prise en charge de ceux-ci. Quand vous prenez en charge un patient Covid-19 plutôt jeune dans l’après-midi, que son état est stable à cet instant et que le lendemain vous apprenez qu’il est en réanimation, que son état de santé s’est dégradé d’une rapidité rarement vue, je ne vous cache pas que cela ne vous laisse absolument pas indifférente et que vous vous posez des questions

Mais je n’ai pas pour autant changer mes habitudes de travail. Je garde toujours le sourire même si on ne le voit pas. J’essaie toujours d’être rassurante, de bonne humeur et d’apporter un peu de réconfort face à cette maladie qui est terrible et inconnue pour nous mais aussi pour les personnes qui en sont atteintes. Par contre, en ce qui concerne l’hygiène, tout à changer… Pas sur les gestes que notre métier nous impose et qu’il est essentiel de conserver, mais dans les gestes liés au fait que ce virus est très contagieux. Avant de rentrer dans chaque chambre je m’habille (photo jointe), une fois les soins prodigués et avant d’en sortir je me déshabille et je me lave les mains. Je répète cette action un nombre de fois incalculable et même si c’est pour quelques secondes dans la chambre du patient. Je travaille avec le strict minimum de matériel nécessaire en chambre et s’il me manque quelque chose je téléphone à ma collègue pour éviter de sortir de la chambre. Ce sont de nouveaux protocoles de prise en charge et de tous nouveaux automatismes à prendre, mais ils sont nécessaires, et incontournables, afin de contenir l’épidémie y compris avec le personnel soignant.

Jusqu’à ce jour j’ai toujours été sereine, consciente du danger pour moi, mes collègues et mes proches.

Même si mon service me manque, je suis consciente de vivre une expérience très malheureuse et très douloureuse que j’espère unique dans ma carrière. Mais je préfère être dans un service où je me sens en sécurité et protégée, malgré un climat général anxiogène….Et puis si j’ai choisi ce métier d’infirmière c’est pour toutes les raisons que vous venez de lire.

Je ne quitte jamais mon lieu de travail sans m’être douchée car une fois ma journée finie à l’hôpital, j’enfile ma deuxième casquette... Depuis 9 mois maintenant, je suis l’heureuse maman d’une petite Alana qui est la prunelle de mes yeux. Pour elle et Guillaume mon compagnon je ne prends aucun risque. Rien n’est trop pour les personnes que l’on aime et il faut certes nous protéger mais eux encore plus. De plus, vous l’aurez compris en découvrant l’âge d’Alana, elle se promène partout, touche à tout et met tout à la bouche pour le grand bonheur de sa mère !!! C’est donc aussi pour elle que je me bats et que je prends toutes ses précautions. Je sais que pour certains le confinement n’est pas simple mais si tout le monde respecte les gestes barrières et agit avec du bon sens nous pouvons espérer voir le bout du tunnel dans les jours et semaines à venir.

Toutes et tous n’oublions pas l’épisode dramatique que nous sommes en train de vivre en respect aux personnes emportées par ce virus. Il faudra aussi en temps et en heure tirer les conséquences, les manques, les besoins pour ne plus revivre une telle crise.

Nous pouvons être tristement fiers de voir que ce terrible évènement a véhiculé des valeurs, inscrites dans les gènes de Bougez contre la SLA…..Solidarité, Bienveillance, Soutien, Entre-aide …la vie tout simplement.

Bientôt nous pourrons à nouveau nous/vous serrez dans les bras les uns les autres.

Je vous embrasse et je vous dis à très bientôt

La strasbourgeoise

Adeline